dimanche 29 mars 2009

Réformes : Attention, danger !

Nicolas SARKOZY restera certainement dans l’histoire comme le Président des réformes.

Lorsqu’on essaie de dresser le bilan de celles-ci, on est submergé : suppressions, regroupements et restructurations des tribunaux, régiments, hôpitaux ; réformes des retraites, des universités, de la recherche, des métiers juridiques, des programmes scolaires, du permis de conduire… ; abandon de la carte scolaire ; instauration du service minimum dans les services publics…

Pas une semaine sans une nouvelle annonce. A elle seule, Rachida Dati revendique 30 réformes en 24 mois… On attrape vite le tournis…

Certains estiment que c’est surtout de la communication. Pourtant il ne faut pas s’y tromper : de telles réformes ne peuvent pas être réalisées en quelques jours et demandent une évolution en profondeur des comportements. La réduction des vitesses ou le service minimum en sont des exemples : il faudra des années pour que nous devenions raisonnables. La loi ne fait qu’amorcer le mouvement. Il faut ensuite que nous nous l’appropriions progressivement. Mais le changement est en marche…

On ne peut également pas affirmer qu’elles soient toutes excellentes. La disparition des hôpitaux et des tribunaux de proximité pour les fondre dans de vastes ensembles souvent ingouvernables peut par exemple être contestée. De même que l’obstination à concentrer la police sur les contraventions et les excès de vitesse alors que les bandes ravagent librement les banlieues.

Mais, dans l’ensemble, il faut reconnaître que beaucoup étaient nécessaires. La réduction de la dépense publique s’imposait (chaque français nait avec une dette de 20 000 € !), nos universités et notre recherche sont à la traine et doivent être revitalisées, notre fonctionnement syndical et politique est archaïque et doit évoluer vers une coexistence constructive…

Il a fallu beaucoup de courage pour se lancer dans cette aventure, car qui dit changement dit aussi oppositions et mécontentements systématiques. Et les politiques n’aiment pas déplaire, réélections obligent ! La loi courante de la dé-mocratie est donc souvent l’immobilisme. Il faut du courage pour rompre celui-ci.

Réalisons cependant qu’une organisation n’est pas seulement un processus théorique qu’on peut changer par décret. C’est avant tout un ensemble d’hommes et de femmes qui ont bâti leur vie, leurs habitudes et leurs projets en se ba-sant sur cette structure. Et la changer leur impose un véritable bouleversement, qui peut être dramatique.

Pensons par exemple à ces petits commerces dont la clientèle disparaît et qui se retrouvent sans chômage ni retraite, à ces personnes qui voient leur lieu de travail déplacé loin de leur propre maison et de leur famille, pensons à ces sa-lariés qui se retrouvent au chômage à 40 ans sans aucune perspective…

Nous construisons tous notre vie petit à petit. C’est un fil délicat qui se dérègle facilement. Lorsqu’on change les règles, il faut penser à l’accompagnement des personnes et leur donner le temps et les moyens de s’adapter.

Sinon on risque fort de créer plus de problèmes qu’on n’en résout et de développer des oppositions qui empêcheront toute poursuite du changement.

Alors, si ces réformes sont bonnes dans l’ensemble, attention, en les cumulant, à ne pas aller trop vite.

Attention, en voulant nous sauver, à ne pas nous faire perdre l’essentiel, soit notre propre vie…

LVPC

samedi 21 mars 2009

Entreprises : de Socrate à Machiavel + Petit poème sur la crise

mise à jour du 13/04/09



Nous savions que les moutons, les baleines, les dauphins… se suicidaient parfois en troupeau, au cri du loup ou des sonars. Nous ne le savions pas des entreprises…

Passons sur le problème moral posé par les licenciements en masse sans se soucier des personnes et de leurs familles, qui font douter de l’appartenance des décideurs à l’humanité …

Mais il faudra un jour relancer les productions : comment faire sans usines, ni ouvriers, ni sous-traitants ?

Je ne vois que deux solutions : soient les patrons sont usés par un travail effectivement très difficile et veulent fermer définitivement leurs entreprises.

Soit ils profitent de la crise pour délocaliser en masse et recréer leurs entreprises sous des cieux plus cléments (de leur point de vue…).



Et de façon plus poétique…

En ce temps-là c’était la crise
Terrorisées, les entreprises
Fermaient à tire larigot
Usines, sites et bureaux

Licenciant tout leur personnel
Cadres comme ouvriers fidèles
Tels de vulgaires déchets
Sans un remord, sans un regret.

On pouvait d'ailleurs s’étonner
Car une firme bien gérée
Épargne les périodes fastes
Afin de survivre aux tempêtes

De plus un jour arriverait
Où il faudrait refabriquer
Mais, sans ouvriers ni usines,
Comment relancer les machines ?

Ou bien agissent-il, je tique
Dans un but plus machiavélique
Pour casser l’industrie française
Prenant prétexte de la crise

Pour partir vers des cieux cléments
Où les salariés sont contents
Malgré des payes misérables
Et des conditions lamentables.

Ah, l’esclavage n’est pas mort !
Il est là sous nos yeux, très fort !

Il nous faut relancer la chasse
A cet’ bête immonde et rapace
Qui exploite les démunis
Et qui toujours, toujours, survit…

LVPC

jeudi 19 mars 2009

Révolution ?

La grande manifestation qui s’annonce aujourd’hui confirme les articles précédents : le profond ras le bol de la population d'une part, la malchance et la maladresse du gouvernement d'autre part.

Dèjà, le 30 janvier, lors de la première journée, on ne pouvait qu’être frappé par la nature des manifestants, qui n’étaient plus des militants ou des excités, mais souvent des non-habitués, qui défilaient dans le calme et sous la pluie. J’avais été frappé par la force qui s’en dégageait et qui montrait que le problème devenait très sérieux.

Déjà à cette date, le Président avait annoncé d'abord qu’il ne bougerait pas, puis pris des mesures qui abordaient tout sauf le pouvoir d’achat. Le gouvernement affirmait écouter et comprendre, mais n’attribuait le mécontentement qu’au stress de la crise et à sa politisation. De quoi exciter encore davantage les intéressés qui venaient seulement clamer qu’on ne peut plus vivre avec 1 000 Euros par mois…

Même scénario aujourd’hui : alors que la manifestation s’annonce absolument énorme, avec de plus en plus de « civils », c'est-à-dire de non-professionnels de la protestation, le gouvernement annonce encore ne pas devoir bouger. Et tombe simultanément une information : dans le cadre du « bouclier fiscal », 800 familles touchant déjà plus de 15 Millions d’Euros annuels, ont reçu 368 000 Euros des impôts. Un véritable chiffon rouge agité devant le taureau !

Dans l’Arène, c’est le matador qui est le plus fort. Ici, est-ce encore le cas ?

La « France d’en bas » comme l’appelait Rafarin, est confrontée à des difficultés croissantes : fermetures en cascade d’usines, baisse considérable des revenus, absences de perspectives d’amélioration, exaspération devant le manque de protection de la part des pouvoirs publics…

Simultanément les informations tombent en continu sur les revenus des riches : Tapie touche 101 Millions, les groupes ayant l'Etat comme principal actionnaire distribuent des dividendes exceptionnels (alors que le Président avait demandé une répartition équitable avec les salariés), aucune contribution exceptionnelle n’est demandée aux plus aisés…

Attention ! La tension monte ! L’exemple de la Guadeloupe est dans toutes les têtes, déjà des policiers se sont fait tirer dessus, les personnels licenciés sont de plus en plus virulents et se déclarent prêts à tout… Le gouvernement joue avec le feu.

La prochaine manifestation va-t-elle voir fleurir les barricades, allons-nous vers une révolution ?

LVPC

mercredi 18 mars 2009

Etat – Peuple : dialogue de sourd ?

Sur le plan sociologique, la situation actuelle de la France est intéressante :

Ainsi, voici un président qui a réalisé de véritables travaux d’Hercule pour le pays, et que pratiquement personne ne reconnaît aujourd’hui à sa juste valeur, chacun se focalisant sur ce qui ne va pas, et c’est facile en temps de crise.

Ces travaux, personne ne les aurait crus réalisables en si peu de temps et sans une opposition insurmontable : l’alignement des régimes spéciaux de retraite sur ceux du privé (les gouvernements précédents s’y étaient tous cassé les dents), la relance de l’Europe, paralysée depuis le non Français, une action déterminante pour limiter les effets de la crise en France et en Europe, le soutien actif au redressement d’Alstom et la résistance à des licenciements de masse par des grands groupes étrangers (même si cela a peu réussi), la réduction progressive du nombre de fonctionnaires afin d’alléger le budget, la relance des économies d’énergie et du développement durable avec les Grenelles de l’environnement, etc, etc… Chaque jour apporte son lot d’actions nouvelles.

Aucun gouvernement par le passé n’a mené autant de réformes de fonds en si peu de temps. Aucun n’a été aussi actif…

Alors pourquoi ce mécontentement général et aussi peu de reconnaissance ?

Les opposants parlent de gouvernement de la parole, de discours sans suite… Ils n’ont pas tout à fait tort. L’Etat s’attaque à des réformes de fond dont les répercussions pratiques ne se font pas sentir directement ou même ne se feront sentir que dans des années.

La relance de l’Europe a permis par exemple une meilleure coordination dans la lutte contre la crise ou contre le crime, le soutien aux PME (22 Milliards de garantie de crédits…) reste invisible aux yeux du grand public même s’il préserve des emplois, la réforme des retraites assure l’avenir de nos enfants mais n’apporte rien aujourd’hui, le « paquet fiscal » a pour but d’éviter la poursuite de la fuite des plus riches —et de leurs fonds— hors de France, mais c’est une action à long terme, etc…

Face aux attentes concrètes de nos concitoyens, confrontés à de lourdes difficultés matérielles immédiates, on comprend que cette action apparaisse théorique et inefficace. Le contraste est grand entre l’immensité des actions « théoriques » menées et le peu de répercussions concrètes. Pensons par exemple aux milliards de prêts accordés aux banques alors que nos concitoyens n’ont besoin chacun que de quelques centaines d’euros… (mais 100 € mensuels accordés à chaque travailleur représentent 20 Milliards annuels…).

Il y a derrière tout cela un très grand manque de psychologie… Nous avons au pouvoir un groupe de responsables extrêmement travailleurs et compétents, et félicitons-en-les, mais ils semblent penser que la grande qualité de leurs travaux suffit pour leur attirer la sympathie des foules. Ce n’est malheureusement pas le cas. Il faut en sus bien communiquer et bien prendre les gens.

Quelles suggestions leur faire dans ce sens ? J’en vois quatre :

D'abord, accompagner les actions de fonds actuelles par des mesures vigoureuses de relance du pouvoir d’achat et de la consommation. Même si cela apparaît inadapté sur le plan économique, car ce seront les importations, et donc la Chine et autre pays à bas coût, qui en profiteront, cela atténuera le malaise très fort de la nation en ce moment. Et ce malaise risque de paralyser toute reprise, en multipliant les mouvements sociaux.

Investir dans le pouvoir d’achat immédiat serait donc des plus utiles pour créer l’ambiance indispensable au succès des autres mesures.

Un pays qui ne sent pas bien ne peut pas se redresser.

La seconde suggestion porte sur le rythme et la méthode des réformes : Celles-ci sont certes utiles et le quinquennat est court, mais les appliquer à marche forcée sans se préoccuper ou presque des conséquences concrètes sur le terrain est suicidaire. Si on ne veut pas multiplier les mécontentements légitimes, il faudrait mieux écouter les intéressés et travailler sur leurs difficultés pratiques, quitte à aller moins vite.

Pensons aux services de proximité supprimés (hôpitaux, tribunaux, régiments, bureaux de poste, commerces de centre ville…), au montant des frais médicaux restant à la charge des patients (dentisterie, lunettes…), à la hausse du carburant et des énergies, aux radars sur les routes qui conduisent à annuler des permis à des professionnels pour des excès de vitesse mineurs et sans dangers…

Le français de base cumule aujourd’hui un ensemble de menaces et de contraintes, qui sont toujours plus nombreuses et stressantes. Comment pourrait-il juger positif un gouvernement qui ne semble pas s’en soucier ?

Troisième suggestion, améliorer la communication : nos compatriotes comprennent mal l’économie, d’autant que celle-ci est aujourd’hui extrêmement complexe et qu’ils n’y ont pas été formés. Si on veut ne pas laisser le champs libre à tous les démagogues qui exploitent les rancœurs, il faut donc expliquer, expliquer, et encore expliquer, sans relâche… Il faut entretenir un dialogue étroit avec la base. Chaque homme politique impliqué doit considérer que c’est une mission prioritaire de son mandat.

Le défaut de communication entraîne l’incompréhension, l’incompréhension le malentendu, le malentendu le manque d’adhésion et de soutien, sinon l’opposition franche.

Enfin, dernière suggestion, éviter les provocations. Le pouvoir s’est spécialisé depuis le début dans une alternance de bonnes mesures et de discours provocateurs, qui ont immédiatement détruit l’effet positif des premières.

On se souvient de l’action énergique de l’automne 2005 pour parer à la révolte des banlieues, puis du fameux « karcher » qui éclipsé toute l’action menée, ensuite de l’élection quasi-triomphale du président, suivie immédiatement d’un séjour « bling-bling » sur le yacht d’un milliardaire, du « maintenant, quand il y a des grèves, les français ne s’en aperçoivent pas » qui a couronné la mise en place du service minimum…

Ce sont sans doute ces écarts de langage qui ont créé progressivement le climat de désamour que nous constatons aujourd’hui. Et c’est ce climat qui rend toute action du pouvoir suspicieuse et laisse la voie libre à toutes les attaques, justifiées ou non. Jamais aucun gouvernement de la république n’a été autant vilipendé…

Ce blog s’est souvent fait l’écho des maladresses, sinon des erreurs commises. Il ne se veut pas partisan et essaye de rester objectif. Notre intérêt à tous est que le gouvernement réussisse, qu’il soit de droite ou de gauche, selon le souhait des français.

Mais, pour cela, il faut que, quel qu’il soit, il nous écoute davantage et nous soigne bien…

LVPC

lundi 16 mars 2009

Petites maximes législatives et réglementaires

Voir aussi les maximes politiques, d'entreprise et de la vie courante
Une réglementation complexe crée automatiquement deux corps de spécialistes, l’un pour aider à sa mise en œuvre, l’autre pour la contrôler. Et ces deux corps constitueront à l’avenir un frein pour toute évolution, surtout si elle simplifie.

Faire simple et expliquer longuement sont les clefs du succès d’une réglementation.

Une réglementation complexe ne sera ni comprise ni appliquée, sauf par les malfrats, pour la tourner à leur avantage.

Une bonne loi est respectée par les gens honnêtes, une loi qui n’est pas respectée par les gens honnêtes est mauvaise.

Chaque modificatif d’une loi sans mise à jour de celle-ci, diminue son efficacité.

Plus la réglementation est précise et plus il y a de fraude.

Plus une règle est compliquée et moins elle est appliquée.

Une réglementation dont on ne suit pas l’application et qu’on n’adapte pas régulièrement est sûre d’aboutir aux résultats inverses de ceux recherchés.

Toute règle doit être contrôlée avec intelligence, en se référant à son esprit et non à sa lettre. La réalité est en effet trop complexe pour qu’un texte puisse s’appliquer à tous les cas. Le vérificateur doit donc juger chaque écart en fonction de ses conséquences réelles et gommer les écarts qui n’ont pas de conséquences nuisibles.

La justice oscille toujours entre dissuasion et équité :
- La dissuasion demande de punir lourdement tout coupable afin de dissuader ceux qui seraient tentés de faire de même, l’équité réclame de dimensionner la peine à la gravité de la faute et à la responsabilité réelle de l’intéressé.
- La dissuasion est plus efficace à court terme et réclame moins de moyens de police et de justice mais elle sème la crainte et la haine, l’équité est plus lente et plus exigeante, mais elle éduque et crée un peuple fort et paisible.

Une règle non appliquée pollue l’ensemble des règles et compromet leur application à toutes.

La concertation est la clef de l’adhésion.

Convaincre vaut toujours mieux que contraindre.

Agir par la motivation est mille fois plus efficace et mille fois moins coûteux qu’agir par la contrainte et les contrôles

Faire confiance au bon sens et à la bonne volonté des gens est globalement plus efficace que de les harceler de règles et de contrôles.

Un règlement sans un dispositif de contrôle efficace est vain.

Une loi doit anticiper les réactions des assujettis : certains essaieront d’en exploiter les lacunes à leur avantage, d’autres y seront formellement opposés et la rejetteront, beaucoup l’ignoreront tant qu’il n’y aura pas de contrôle. Il faut parer à toutes ces éventualités.

LVPC

Entreprises : retour à la lutte des classes

On croyait le temps de la lutte des classes révolu, ce temps du capitalisme sauvage où salariés et patrons se battaient les uns contre les autres, les premiers accusant les seconds d’être des exploiteurs éhontés (et ils avaient souvent raison…).

Mais le résultat en était une neutralisation réciproque : les ouvriers bloquaient les usines, les dirigeants gouvernaient par la crainte et le contrôle. Les relations étaient fondées sur les rapports de force.

On avait eu l’impression que le monde industriel était devenu progressivement meilleur : la dictature du prolétariat avait disparu du vocabulaire après l’échec de l’URSS comme du Maoïsme. Le management s’était modernisé en devenant plus participatif, en recherchant l’amélioration du cadre de travail, et les avantages s’étaient multipliés : réduction progressive des horaires, comités d’entreprises richement dotés, participation…

Les dirigeants semblaient avoir compris que l'entreprise réussit d’autant mieux que son personnel est motivé et s’investit. Dans les usines, le dialogue social était devenu souvent étroit, le directeur et les cadres se rapprochaient davantage de chefs d’équipe que de cerbères dominateurs, les valeurs devenaient le vrai ciment des compagnies… Hervé SERYEX pouvait parler de « l'entreprise du troisième type » et Thomas Peters et Robert Waterman du « prix de l’excellence ».

Soyons persuadés que l’expansion économique et le progrès technologique majeurs de la fin du vingtième siècle, en dépit des différentes crises (chocs pétroliers, guerres, irruption des pays à bas coûts…), sont dus à ce recentrage de tous autour du seul projet de l'entreprise et de leurs intérêts communs.

C’était un temps où les personnels pouvaient aller au travail avec entrain, y compris le patron. L'entreprise retrouvait, outre une rentabilité optimale, son rôle social de fédératrice du travail, l’union faisant la force.

Hélas, nous avons vu la situation se dégrader progressivement :

D'abord les rachats et regroupements au sein d’ensembles gigantesques qui interdisaient le lien humain entre une direction et ses personnels, séparés par des milliers de kilomètres et des cultures différentes. Le salarié devient un simple numéro qu’on peut virer sans un regret. Le patron peut s’octroyer primes et stock-options démesurées sans revoir chaque nuit les têtes hostiles de ses employés.

Les 35 heures, en rétablissant les pointeuses là où la confiance avait fini par régner, chacun travaillant plus ou moins selon le besoin, et en surchargeant les cadres et les directions du travail que le personnel de base ne faisait plus, ont aussi durci les relations.

Chacun regagnait son coin, les ouvriers étant persuadés qu’en travaillant moins, c'est-à-dire en pénalisant l'entreprise, ils rendaient service à leurs collègues chômeurs.

Se sont rajoutés la spéculation internationale, les « hedge funds », les Jerome KERVIEL, les prêts malhonnêtes des subprimes américaines…, tous recherchant un profit immédiat maximal sans une pensée pour les victimes exploitées.

Aujourd’hui, nous atteignons le paroxysme de ce recul de l’esprit de responsabilité : les grands groupes profitent de la crise pour licencier en masse alors qu’ils font simultanément des profits mirifiques. Pas une considération pour les familles ainsi plongées dans des difficultés insurmontables. Pas de scrupules de la part d’actionnaires recevant des dividendes non négligeables.

L’honnêteté morale et les valeurs humaines deviennent choses rares dans le grand patronat, voire paraissent en voie de disparition.

Où allons-nous ?

Il y a fort à parier que, après cette agression caractérisée envers les salariés, ceux-ci se rebellent et multiplient les grèves et les obstacles : l’ampleur des manifestations pour le pouvoir d’achat et des protestations contre les licenciements en est déjà le signe.

A force de faire preuve d’un égoïsme et d’un manque d’humanité forcenés, nos spéculateurs et patrons voyous vont nous ramener tout droit à la lutte des classes. Dans sa tombe, Karl Marx doit se trémousser de plaisir !

La confiance dans les entreprises va être durablement atteinte. Notre pays ne les aime déjà pas beaucoup, méconnaissant que c’est à elles qu’il doit sa prospérité. Le présent ne peut que le renforcer dans cette erreur historique.

Fini l’esprit d’entreprise, disparu le souci de bien servir le client, aux gémonies le dévouement et la volonté de gagner sur le marché !

Et terminée aussi l’expansion économique. Seuls les pays qui sauront sauvegarder ce joyau que sont des entreprises dynamiques, performantes et humaines domineront demain l’économie, et donc la vie internationale.

Si nous voulons que nos enfants prospèrent, il nous faut revenir à la raison. Il nous faut impérativement réglementer davantage le comportement des fauteurs actuels et ne plus les laisser sévir impunément.

Inversement, devenons adultes en matière économique et industrielle. Reconnaissons l’importance primordiale des entreprises pour la prospérité de notre pays et pour notre propre confort.

Vilipendons et sanctionnons les patrons exploiteurs mais reconnaissons les mérites de ceux qui se consacrent honnêtement à leur métier de manager, sans abuser de leur position. C’est la grande majorité d’entre eux et leur tâche est actuellement extrêmement difficile et risquée.

Le retour aux égoïsmes catégoriels et à la rivalité entre classes sociales ne peuvent que nous conduire dans une impasse et une régression.

LVPC

L'auteur

Ces articles sont écrits par Christian DOUCET ccdt@cegetel.net