lundi 24 mars 2008

Les patrons félons

Quelle époque que celle où les « grands patrons » profitent de leur position pour empocher des sommes fabuleuses ! Denis Gautier-Sauvagnac, l’ancien président de l’UIMM (fédération patronale de la mécanique) vient de se voir attribués 2.6 millions d’Euros alors qu’il a été licencié pour avoir géré une caisse noire de 600 M€. Dans ce triste palmarès, il succède ainsi à Pierre Messier, Noël Forgeard et autre Daniel Bernard, patron de Carrefour, rois des parachutes dorés et des stock-options.


Allez-y, messieurs, servez-vous ! Que le savoir-faire de ces hardis entrepreneurs serve d’exemple aux fonctionnaires des impôts pour puiser dans les caisses de l’Etat, aux dirigeants des caisses d’assurance maladie dans celles de la sécurité sociale, à ceux de l’UNEDIC dans celles du chômage !

On ne voit d'ailleurs pas pourquoi cela s’arrêterait là. Pourquoi l’homme de la rue ne volerait-il pas l’acier des rambardes d’autoroute, les banquettes des TGV, les médicaments des hôpitaux ! Ce ne serait que saine justice !

Rappelons quand même que l’homme a mis des millénaires pour sortir de la barbarie, pour construire des règles sociales qui permettent à tous de vivre (à peu près) en paix. Revenir au chacun pour soi, c’est nier tout le progrès de nos civilisations, toute la richesse de notre culture et de notre philosophie. On attendait autre chose des dirigeants de nos grandes entreprises !

Rappelons aussi que l’entreprise est avant tout un système collectif de production au sein de laquelle actionnaires, dirigeants et salariés jouent simplement des rôles différents, sans qu’il y ait une supériorité humaine quelconque des uns sur les autres. Si le patron, parce qu’il a le pouvoir, se décrète supérieur et empoche à ce titre la richesse collective, on en revient en fait à la loi du plus fort, à la préhistoire de la civilisation....

Rappelons enfin que l’entrepreneur gagne de l’argent grâce au travail de ses personnels, et que ceci implique que les profits soient partagés avec ceux-ci. S’il ne le fait pas, il abuse de ses salariés de la même façon qu’un escroc abuse ses gogos.

Alors, Messieurs les patrons, redescendez sur terre ! Ce n’est pas parce que le code pénal vous ignore alors qu’il punit le hold’uper ou l'aigrefin courant, que vous devez vous exonérer de toute honnêteté morale et de toute dignité !

Tant que nous aurons ainsi des patrons qui ne sont pas des entrepreneurs, mais tout simplement des malfrats, les français auront bien du mal à aimer leurs entreprises !

Le Vilain Petit Canard

3 commentaires:

  1. Cette histoire du "partage du profit" me paraît vaseuse; rappelons en effet ce qu'est une entreprise : c'est une association de 3 composantes. D'une part les entrepreneurs actionnaires qui créent l'entreprise, d'autre part les salariés qui fournissent leur travail à la dite entreprise, enfin les banquiers qui lui fournissent des crédits ou de la trésorerie.
    Or il convient de remarquer que dans cette association, 2 composantes -les salariés et les banquiers- reçoivent un revenu préalablement déterminé (le salaire et le taux d'intérêt) et non modifiables en fonction des résultats de l'entreprise; ils ont signé un contrat et touchent une rémunération fixe en contrepartie d'une prestation déterminée. Seule la composante "entrepreneur", qui fournit aussi le capital de départ, n'a aucun droit préalable et assume donc seule le risque économique : elle peut donc perdre la totalité du capital engagé sans avoir le droit de se plaindre et de demander un dédommagement; la contrepartie de ce risque assumé évidemment, c'est la possibilité à l'inverse de "rafler la mise" si l'entreprise est une réussité.
    Voilà la règle du jeu tacite sur laquelle est fondé le capitalisme et l'on comprend que toute entorse à cette règle du jeu met en danger la notion d'entreprise et surtout le goût d'entreprendre, car pourquoi courir le risque de voir fondre ses économies si c'est pour ne rien gagner en retour ? or l'entrepreneur est bien dans la démarche de miser 100 pour éventuellement toucher 1000 si tout se passe bien. C'est d'ailleurs parce qu'on a progressivement affaibli cette logique implacable qu'on voit en France les difficultés à suciter des vocations d'entrepreneurs...
    Or il est aussi incongru que le salarié demande une participation aux bénéfices (n'a-t-il pas touché son dû tel qu'il était prévu initialement et qu'il avait alors accepté ?) que le banquier revoie ses intérêts d'emprunt à la hausse sous prétexte que l'entreprise cliente a fait de gros bénéfices...
    Que l'on prévoit un intéressement dans certains cas pour assurer la motivation du personnel, c'est une très bonne chose et qui s'inscrit dans une autre logique, celle de la gestion bien comprise des ressources humaines mais n'a rien à voir avec ce pacte fondateur des 3 composantes.

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  2. Merci pour ce commentaire. Toutefois, l’argumentaire qui fait reposer les revenus des patrons sur les risques importants qu’ils prennent, me laisse perplexe.

    En effet, en cas d’échec, c’est certainement le patron qui court le risque le plus faible, soit simplement de l’argent et sans que sa survie soit en cause.

    Par contre, compte-tenu des rigidités actuelles du marché de l’emploi, les salariés qui se retrouvent à la rue ou mutés dans des secteurs non désirés, voient toute leur existence et celle de leur famille compromises.

    Et on pourrait aussi parler des fournisseurs, commerçants, collectivités locales… que la défaillance d’une entreprise laisse aussi sur le sable.

    Donc, si on suit les partisans de la rémunération au risque, c’est le patron qui devrait toucher le moins…

    Je préfère considérer pour ma part l’entreprise comme un groupe humain destiné à produire et à faire réussir ses membres. Dans ce cadre, l’ouvrier qui fait le minimum comme le patron qui exagère ses profits sont malhonnêtes vis-à-vis du groupe.

    Les gains doivent être partagés. C’est le secret d’une entreprise qui cumule toutes les forces de sa direction et de ses salariés, ce qui est essentiel pour réussir et durer.

    Je crois que nous sommes alors dans le droit fil du vrai esprit d'entreprise et non dans le capitalisme sauvage, qui me semble constituer de fait une déviance vers l'escroquerie.

    J'attends la suite du débat...

    Le Canard.

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  3. Vous pouvez considérer toutes les conceptions de l'entreprise que vous voulez, elles ne changent rien à la réalité car elles ne sont pas opérantes vis à vis de la création d'entreprises. Vous pouvez faire toutes les lois que vous voulez, vous ne pouvez pas obliger quelqu'un à risquer son argent personnel s'il n'en voit pas l'utilité... pour lui; or je suis désolé, sans entrepreneur...pas d'entreprise. En cas d'échec, c'est bien sûr le patron qui court le plus gros risque puisqu'il perd tout, son actif est saisi pour rembourser ses créanciers (au rang desquels les salariés, les fournisseurs et les banquiers); voilà la réalité, non pas de quelques groupes multinationaux mais de l'entreprise "normale".
    Le salarié, en revanche ne perd absolument rien dans l'affaire, il touche son dû (et parfois une prime de licenciement) et peut ajouter à son curriculum vitae une expérience supplémentaire qui va lui permettre de retrouver un emploi dans des conditions encore meilleures. Donc sa situation est infiniment préférable à celle du patron (savez-vous qu'à HONG KONG les salariés ont une journée pour démissionner s'ils ont trouvé mieux ailleurs ?)
    Vous ne pouvez pas vous polariser uniquement sur la situation (marginale en nombre même si elle est médiatisée) de salariés peu qualifiés qui ont travaillé à l'usine depuis 30 ans et qu'on remercie du jour au lendemain et condamne au chômage dans leur bassin d'emploi jusqu'à la retraite; ils nécessitent un traitement particulier (voir la Grande Bretagne, bien plus exemplaire que la France dans ce domaine contrairement aux idées reçues).

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L'auteur

Ces articles sont écrits par Christian DOUCET ccdt@cegetel.net